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Entrer en résonnance avec son instrument

Updated: Oct 11, 2021

La notion de projection est cruciale dans l’élément son. Elle en définit le caractère même. Si le son est la carte d’identité des musiciens, le timbre en est la photographie, mais la projection c’est l’âme même de la personne qui joue montrée au spectateurs.

La projection se base sur un phénomène simple, celui de la résonnance. Lorsque les cloches d’une église sonnent, elles sont audibles de très loin. Ce n’est pas parce qu’elles sont frappées particulièrement fort, c’est la résonnance qui leur permet d’avoir autant de portée.


Entrer en résonnance avec son instrument avec son corps et son âme, permet de créer une connexion avec ceux des auditeurs

La posture habituelle de travail consiste à n’écouter que le son produit par notre instrument comme si nous étions à la place des spectateur. Cela exclu notre propre corps des paramètres du son. Cette façon de concevoir le son a plusieurs effets pernicieux :

· Tout d’abord elle oblige à faire des réglages après émission du son, ce qui est trop tard

· Elle ne permet pas un mouvement entièrement en direction du public vu que nous gardons une partie du son pour nous-mêmes afin de l’analyser au lieu de tout offrir

· Elle peut nous amener à faire des modifications faussées par la perception de l’oreille interne et donc n’avoir un joli son que pour soi, qui ne projettera pas et manquera de générosité


Sentir le son


Il faut se rappeler ici que schématiquement le son est une vibration qui se déplace jusqu’à nos oreilles. Nos cerveaux interprètent alors cette vibration et nous entendons un son. Rappelons nous aussi que les vibrations du son se déplacent plus vite dans l’eau que dans l’air. Or notre corps est constitué en majorité d’eau. En étant en contact avec l’instrument, il entre donc dans les paramètres subtils du son.


Lors de vos séances personnelles, tentez l’expérience de sentir les vibrations du son parcourir votre corps. Pour mettre toutes les chances de votre côté, je vous suggère d’avoir bien établi et senti le concept d’effort minimal dont j’ai parlé dans un article précédent.


En effet les muscles relâchés sont plus à même de pouvoir entrer en vibration que les muscles tendus

Pour vous prouver cette affirmation, tapotez votre biceps avec l’index quand le bras est relâché, les vibrations sont visibles à l’œil nu. Tendez votre biceps et recommencez, le bras reste plus ferme.


Remplir le corps pour emplir la salle


Le schéma corporel classique oublie souvent la troisième dimension. Les dessins enfantins d’un bonhomme de face sont la représentation graphique que beaucoup de personnes ont de leur corps. En effet, comme nous sommes très visuels, ce qui est devant nous est plus facile à imaginer que ce qui est derrière.


La sensation étrange que nous avons parfois de nous voir en photo ou en vidéo de profil est suffisante pour prouver que l’habitude de nous voir de face dans le miroir conditionne notre vision de nous-mêmes.


Lorsque vous commencerez à sentir les vibrations du son dans votre corps, essayez de diriger votre conscience sur les zones que nous ne voyons pas. Le dos, l’arrière de la tête, prenez conscience de la profondeur de votre cage thoracique, sentez vos bras reliés au dos au niveau des omoplates. L’arrière des jambes aussi, les mollets, la plante des pieds, l’espace entre le talon et le coup du pied.


A terme, imaginez vous dans une sorte de bulle de vibration de la forme de votre corps s’étendant dans toutes les directions

C’est alors qu’apparaitra véritablement un paramètre de la projection que j’ai omis volontairement jusque là, j’ai nommé la salle. J’ai préféré jusqu’à présent recentrer mon discours sur le corps et les vibrations, davantage que le son que nous percevons. Quand ces sensations seront acquises, vous pourrez également ressentir le retour de la salle et ses effets sur votre corps.

Tout se passe dans des délais formidablement courts, inconcevables pour notre esprit. Le retour des vibrations de la salle à l’instar du sonar des dauphins a un impact sur notre corps et quelque part dans notre inconscient même si nous n’avons officiellement pas de capteurs dédiés à ce sens.


Lorsque nous arrivons à trouver l’équilibre entre les vibrations de l’instrument, du corps, et le retour de la salle, nous parvenons à une projection optimale. C’est ce qui permettra de s’adapter à différentes acoustiques.

La salle, nos compagnons de jeu et les spectateurs entrons alors dans une sorte de bulle de vibration géante dans laquelle chacun (même celui qui somnole au troisième rang) a sa part et participe à l’unicité de l’instant. C’est ainsi que nous pouvons offrir notre son entièrement aux auditeurs, en les rendant acteurs des paramètres sonores.


C’est en partie ce qui explique la qualité si différente des concerts en salle par rapport aux captations même si ces dernières peuvent être de très bonne qualité


Lorsque les vibrations individuelles se rencontrent, elles en créent une nouvelle


Ecouter son corps


Après ces explorations quelque peu métaphysique mais qui correspondent à mon expérience, je reviens à une part plus pragmatique.

Certains jours nous ne sommes pas en forme, nous avons mal quelque part, un rhume, une mauvaise nuit. Bref nos sensations seront différentes et sembleront imparfaites. Il faut être capable de le sentir et surtout de l’accepter.


Dans ce cas, il y deux choses à faire :

· S’adapter au mieux afin de continuer à donner le meilleur de nous même, en acceptant une qualité différente sans la juger comme étant inférieure.

· Repérer ce qui peut être la cause de cette baisse de régime (repas trop copieux, consommation d’alcool, nuit blanche...) et éviter cela à l’approche d’échéances importantes.


Pour conclure, écouter son corps, sentir le son et l’environnement ne sont pas toujours une approche très pratiquée. Cependant cela est une piste intéressante à explorer.


Chose très importante, l’instant de communion décrit plus haut n’est pas toujours un moment agréable pour tout le monde. Nous ne pouvons pas plaire à chacun et ce n’est pas non plus le but de l’Art. L’approche de séduction qui pourrait être tentante ne doit pas être engagée. Elle n’est que le résultat d’un besoin de reconnaissance par les autres et nous oblige souvent à porter un masque cachant notre vrai nous. Sans compter la blessure inévitable lorsque nous essuierons des critiques négatives.

L’objet de l’article était plutôt d’envisager une façon de donner entièrement ce que nous ressentons et ce qui nous fait vibrer sans mauvais jeu de mot, en acceptant que nous ne pouvons être au goût de chaque personne qui nous entend.


Le seul vrai reproche qui peut être fait à un artiste est qu’il ou elle ne s’est pas entièrement dévoilé/e

Bonne pratique et n’oubliez pas de vous amuser !

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