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Writer's pictureArthur Sandoval Clarinette

La Musique : mouvement et directions



Parvenir à concevoir la Musique comme un véritable langage, une façon de transmettre un message, c’est comme déjà évoqué nombre de fois dans ce blog, aller plus loin que l’aspect des notes et des rythmes. Si nous voulons définir ce qui fait la spécificité d’une langue parlée, il y a les accents toniques, les inflexions et autres intonations.


Pour transcrire l’oral, l’écrit a été créé, cependant une chose vitale différencie l’oral de l’écrit : ce dernier est figé. Le son se développe dans la dimension du temps, mais aussi dans l’espace. Lisez un mot à haute voix. Il existera durant un temps donné, s’étendra dans l’endroit où vous vous trouvez puis s'évanouira . Pendant ce temps, si vos yeux ont fixé le mot écrit, ce dernier n’aura pas bougé sur la page, il ne sera pas plus vif ou moins visible. En lisant dans la tête nous donnons également vie aux mots : sans lecteur, un livre reste muet.


Une autre façon de voir les choses, serait de réaliser que lire à haute voix ou bien jouer ou chanter une partition, c’est mettre notre âme dedans, l’animer au sens étymologique. 


Donner notre voix à un texte, c’est le mettre en mouvement dans l’espace et dans le temps

Arrivé à la fin de cette introduction, j’espère que vous avez saisi si ce n’était pas encore fait le caractère naturellement trompeur de l’écrit, aussi utile qu’il puisse être, il est loin d’être parfait, et c’est notre émotivité humaine qui pourra rendre le texte vivant.


Dans cet article, des pistes seront développées pour aider à s’approprier ce concept. Un autre suivra éventuellement un jour afin de décrire la mise en application. Celle-ci est encore un domaine d’exploration pour moi, je ne parlerai pas des choses que je ne maîtrise pas pleinement.


La première image que je propose de découvrir et réaliser, c’est de conceptualiser la musique comme un mouvement, un enchaînement. Ce qui est souvent entendu de la part des personnes qui ne réalisent pas bien cela, c’est ce que je qualifierais plutôt de succession. Les notes se succèdent les unes aux autres, comme les perles d’un collier qui ne seraient pas reliées par un fil.


Dans mon expérience, un des meilleurs moyens de sentir le cheminement de la musique est d’observer des danseurs ou des danseuses. Quand nous avons saisi la dimension d’espace que prend cette forme d’expression, nous pouvons nous entraîner à « dessiner » la musique avec le bras par exemple. D’abord en l’écoutant puis en se la chantant dans la tête ou de vive voix. Il n’y a pas de chorégraphie à trouver ni de mouvements imposés, ce qui nous vient à l’esprit ou plutôt au corps sera notre proposition. 


Cette expérimentation est un moyen de relier le corps et le mental trop souvent séparés

En faisant ce jeu, il est souvent réalisé que les valeurs longues ne sont pas vécues pleinement, que les enchaînements de notes rapides peuvent créer des tensions et ou limitent les mouvements. 


Plus nous saurons être larges et détendus, plus nous nous rapprocherons de notre nature. En pratiquant cette sorte de musique dansée, nous pourrons également remarquer après un certain temps, qu’un mouvement globalement arrondi est ce qui nous apportera le plus de détente et de direction.


Pour digresser un peu, l’arrondi est pour moi la forme qui sous-tend tous les gestes et toutes les directions. Du lancer de javelot à l’orbite des astres. A l’inverse,  ligne droite et les angles sont comme des aspérités qui créent des temps d’arrêt et de blocage de l’énergie.


Il est possible de dessiner un cercle d’un seul trait sans changer la vitesse de mouvement, alors qu’à chaque angle d’un carré, l’énergie s’arrête brièvement

Pour moi, il y a deux façons de ressentir les mouvements de la musique, les deux étant complémentaires comme souvent. On peut le faire de façon analytique, harmonique ou de façon instinctive. Les deux sont liées, car l’harmonie est née d’une recherche instinctive de sensations jusqu’à un certain point où il arrive que l’harmonie soit calculée pour donner des sensations précises. 


L’approche théorique demande une connaissance, un bagage qui est selon moi indispensable. Il peut s’apprendre sur le tas, mais dans ces conditions, son appréhension est retardée. L’approche instinctive demande de la curiosité, de la pratique et beaucoup d’écoute critique (voir l’article sur l’écoute). 


L’idéal est de combiner les deux pour  voir notre instinct confirmé ou pondéré par une analyse un peu poussée, ou trouver des idées en passant directement à la compréhension du texte que nous passerons au filtre de nos sensations.


Nous retrouvons l’importance de lier le corps et le mental comme vu plus haut

L’approche littéraire que j’ai souvent de la musique, m’amène à visualiser les morceaux comme des livres, le plus souvent des romans, parfois des poésies, des nouvelles ou même des pièces de théâtre selon la durée et la narration adoptées par le compositeur ou la compositrice. 


Dans cette approche, chaque phrase peut être selon le style, un chapitre, un vers, une réplique, une didascalie, un voyage… et chaque morceau peut être un pan de vie, un épisode d’une série, une pièce entière. Il n’y a pas de limites à l’imagination.


Une autre image qu’un ami m’avait partagé me plait beaucoup aussi. Il imagine chaque morceau comme une chaîne de montagne qu’il observe, il y a le plus haut sommet, les autres montagnes, les vallées encaissées, les zones éclairées et les zones à l’ombre, encore une fois l’imagination ne connaît pas de frontière et est parfois si belle. 


La sensation de plénitude ressentie lorsque nous réalisons que chaque détail d’un ensemble a son importance est incomparable. L’interdépendance du petit qui a besoin du grand pour être, et du grand qui ne serait pas le même en retirant le moindre de ses composants

Une dernière dimension du mouvement dans la musique est le cheminement intérieur que nous faisons en écoutant ou en interprétant une œuvre. Que l’on ait aimé ou détesté, je ne conçois pas qu’une œuvre musicale ou autre puisse laisser inchangée la personne qui l’a réellement  rencontrée.


La démarche d’écouter volontairement revient à choisir d’ouvrir notre âme et accepter qu’une œuvre vienne y laisser sa trace indélébile. C’est une démarche sacrée qu’en tant qu’artistes nous nous devons respecter, et pour laquelle nous pouvons ressentir de la gratitude

Sans rentrer dans les détails du fonctionnement nerveux, psychologique et même cellulaire de l’impact d’un morceau que nous décidons d’écouter, il y a toujours un avant et un après. Des pensées peuvent germer, des émotions apparaitre. Nous bougeons intérieurement, certaines personnes voient des couleurs, d’autres ont des sensations de chaleur. Je vous invite à consulter les recherches neuroscientifiques toujours riches d’enseignement sur nos actions.


Ce qui est évoqué artistiquement peut réveiller des souvenirs qui iront titiller des zones du cerveau nous rappellent des odeurs, des goûts et des émotions. Lorsque tout est fini, j’adore cette sensation d’avoir été « remué » de me sentir comme un liquide trouble qui finira par décanter pour revenir au calme.


En tant qu’interprètes, réaliser que nous avons ce pouvoir d’évoquer de telles sensations, nous donne comme qui dirait de grandes responsabilités. Nous devenons de véritables médiums entre le compositeur ou la compositrice et le public, chaque individu réagissant différemment. 


Nous transmettons un message et nous devons de le faire avec humilité, respect, et dans ces moment-là, la résonance que nous renvoi le public, exprimé notamment à la fin par les applaudissements est une sensation merveilleuse. Cette communion dont le point culminant est l’instant de silence qui précède les applaudissements est notre façon collective d’exprimer notre joie d’avoir partagé l’art ensemble.



A chaque fois cette question : d’où sont venues ces émotions, où sont-elles allées ? Le silence après la musique rappelle le mystère de la vie

Bonne pratique et comme toujours, n’oubliez pas de vous amuser !


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