Bien souvent nous sommes désarmés lorsqu’il nous arrive de faire une erreur. En effet nous ne sommes culturellement pas préparés à savoir quoi faire de ce qui semble être une tâche d’encre sur une page d’écriture.
Cependant jouer de la musique ce n’est pas recopier des lignes sans déborder, sans tacher. Une fausse note ce n’est pas une tache indélébile qui fait perdre toute valeur au reste. Tout d’abord l’erreur est humaine, c’est la répéter qui est problématique.
Ensuite, savoir accepter, analyser et gérer nos erreurs est un moyen merveilleux d’apprendre à nous connaitre et de progresser. Dans cet article je vais présenter dans un premier temps ce qui est pour moi la première source d’erreur. Après cela je déclinerai les différentes phases pour tirer le meilleur des erreurs qui pourraient encore survenir.
Après tout, les erreurs sont-elles si graves ?
L’erreur est humaine, la négation aussi
Jouer avec ses erreurs, que ce soit en séance de travail, en préparation de concours, en concert ou n’importe quelle autre situation, c’est avant tout se donner le droit à l’erreur. Rien que ce fait aide à libérer beaucoup de tension.
En effet, lorsque nous nous mettons en tête de ne pas faire d’erreur, c’est là que nous prenons le plus de risque d’en faire une. L’explication se trouve quelque part dans notre cerveau. Une partie de notre cerveau ne connait pas la négation. La négation est une chose qui n’est pas naturelle, c’est une invention de l’être humain.
Cette partie de cerveau, c’est celle qui, quand quelqu’un nous demande de ne pas penser à un éléphant rose, nous fait immanquablement visualiser ledit éléphant. Bien sûr ce n’est pas une formule magique qui va supprimer toutes les erreurs.
Penser positivement chaque note pour ce qu’elle est c’est très différent de penser à comment ne doit pas être la note. C’est plus simple et plus direct : il n’y a qu’une bonne réponse dans le premier cas. Dans le deuxième cas, il faut mettre des panneaux interdits partout pour obtenir une définition vague.
Lorsque nous jouons, nous devons laisser aller la crainte de nous tromper.
Comprendre ses erreurs
Quand nous arrivons à ne plus essayer de ne pas faire d’erreurs (vous voyez que ce n’est pas facile la négation !) un bon nombre de celles ci ne se produiront pas. Cependant évidemment il nous arrivera encore de nous tromper, de sauter une note, de faire un canard, les clarinettistes comprendront. Pour le dernier cas d’erreur, c’est facile d’entendre. Pour les autres, je conseille le travail lent tel que je le décris dans l’article sur la lenteur.
Lorsqu’une erreur se produit, il faut donc d’abord être capable de l’entendre. La suite est d’identifier ce qui a causé l’erreur. Un doigt s’est levé trop lentement, trop vite ou était mal placé ? Problème de lecture ? Oubli d’altération ? Autre chose encore ?
Il peut y avoir toute une panoplie de raisons, parfois de manière simultanée. Chaque problème possède sa ou ses solutions. Rappelez-vous de l’article sur les bases de la clarinette. Quel que soit le niveau d’un instrumentiste, lorsqu’il rencontre des difficultés, cela revient toujours aux bases. Même lorsque nous utilisons des techniques avancées ou contemporaines, les bases de notre instrument restent les mêmes.
Pour les oublis d’altération et les problèmes de lecture, n’oubliez pas que le crayon est un allié très utile, du moins tant que vous jouez avec la partition !
Apprendre de ses erreurs
A force de repérer les endroits où nous nous trompons, nous pourrons remarquer certains schémas répétitifs. Nous aurons tendance à perdre nos moyens sur un type d’enchaînement de notes particulier par exemple. Ce genre de difficulté méritera un effort conscient pour compenser la racine de l’erreur.
Par exemple sur tel intervalle, un instrumentiste à vent aura repéré qu’il a tendance à relâcher son soutien. Dans un morceau différent, en rencontrant un passage similaire, il s’agira de penser à soutenir davantage pour éviter de refaire l’erreur.
Cela n’est possible que si nous avons vraiment analysé l’erreur précédemment, noté quelle base était en défaut. Il faut alors revenir au principe de la pensée positive. Dans l’exemple, il faudra penser à davantage soutenir dans le passage concerné.
Si nous nous contentons de nous lamenter ou de nous réprimander après avoir fait une erreur, nous n’en apprendrons jamais rien.
Découvrir ses points forts
Il ne s’agit pas uniquement de repérer nos points faibles lorsque nous jouons. Il est aussi très profitable de reconnaître les moments qui nous semblent faciles. Ce seront nos points forts. Il est important de se faire plaisir pour garder la motivation. Sachez vous féliciter pour vos qualités.
Connaître ses qualités nous permet en outre de les cultiver et de guider nos interprétations afin de les mettre en valeur. Si vous avez par exemple une facilité naturelle pour le legato, sachez choisir vos morceaux en fonction de cela. Repérez les passages qui vont mettre cette capacité en valeur.
Cela permettra de renforcer votre confiance en vous-même et vous prendrez plus de plaisir à jouer, en séance individuelle ou en représentation.
En observant nos points forts et nos qualités, nous pouvons également analyser sur quoi elles se bâtissent. Cela peut nous donner des pistes pour nous améliorer.
Jauger ses progrès
Enfin, après avoir réussi à analyser nos erreurs et trouvé leur origine, nous pourrons tout simplement nous apercevoir des progrès réalisés lorsque nous ne les reproduirons plus !
Notre jeu en sera ainsi plus harmonisé. Il faut garder en tête cependant que nos points faibles seront toujours là et que revenir dessus sera un travail régulier lors de notre vie de musicien. Ce sont ces petits accrocs qui donnent du sens à notre pratique quotidienne et nous donnent des objectifs.
L’appel du zéro erreur
Une de nos habitudes d’écoute est l’enregistrement. C’est un merveilleux outil cependant il possède un revers. Derrière l’écrasante majorité des enregistrements, il y a de multiples prises, une disposition particulière des micros, une pièce adaptée, le travail d’un ingénieur du son.. Cela est très loin d’une interprétation réelle. Cette image auditive est trompeuse. C’est comme les photos retouchées des publicités, il faut être conscients que ce n’est pas la réalité.
Notre originalité réside dans nos points faibles et dans la façon que nous avons trouvé pour les compenser, ainsi que dans nos points forts et la capacité que nous avons de les mettre en valeur. Le tout saupoudré des émotions et sentiments que nous intégrerons à notre interprétation.
En tant qu’artiste, être parfait semble attirant, mais ce n’est pas ça qui nous rendra remarquable. Comme je le dis souvent à mes élèves, jouer chaque note juste, en place et le plus vite possible, un ordinateur peut le faire mieux que nous ! Soyons humains et jouons avec nos erreurs.
Nous revenons au titre de cet article, jouer avec ses erreurs et pas jouer sans erreur ni jouer contre ses erreurs.
Bonne pratique et n’oubliez pas de vous amuser !
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