La pratique rend parfait, pas de souffrance, pas de gain etc... Les phrases de motivation vantant les vertus du travail et de l'effort font légion. Dans cet article je pose la question de l'interprétation que nous pouvons en faire et quels sont les facteurs qui peuvent encore nous permettre de nous améliorer. En m'inspirant des principes de la pyramide de Maslow adaptée à la pratique instrumentale dans un pays comme la France, je vous propose de réfléchir aux mécanismes d'apprentissage d'un point de vue systémique.
L'état d'esprit général reste propice à la productivité. Qui peut faire le plus, fait forcément mieux. En effet il est rassurant d'utiliser les chiffres et la logique pour leur confier nos vies, cependant cela porte ses limites. Dans l'extrême certains pourraient être amenés à penser que pour devenir le meilleur il suffit de passer le plus de temps possible à pratiquer son instrument.
Cette approche contient deux failles majeures dans le cadre de la pratique artistique en tout cas : comment déterminer qui est le meilleur en musique ? De plus nous sommes des êtres humains et avons des besoins primaires à remplir.
Ecouter le corps
Nous avons en premier lieu des besoins physiologiques que nous devons assouvir afin de rendre notre corps apte à assimiler des informations. Dormir, boire, manger, évacuer, sont des activités si basiques que nous en oublions parfois leur importance. Regardez les autres êtres vivants, leurs journées et leurs nuits sont principalement tournées vers ces besoins.
Se donner le temps de bien manger, boire et dormir est primordial si nous voulons que notre pratique instrumentale porte ses fruits. Imaginez-vous en train de vous retenir aux toilettes alors que vous insistez sur un passage difficile. Vous y passerez beaucoup de temps car toute une partie de votre cerveau est occupée à contenir votre vessie !
Une fois ces bases respectées, il y a également les signaux de douleur que notre corps peut envoyer. Une posture incorrecte, un usage excessif des muscles créent une accumulation de signaux. Bien souvent nous les ignorons, préférant orienter nos capacités cérébrales vers l'activité que nous réalisons.
Nous oublions alors une chose fondamentale : il n'y a pas que l'action qui compte, mais la façon dont nous la réalisons, qui fait autant partie du résultat, dans la durée, et surtout sur la reproductibilité de l’action
Il est important d'être à l'écoute du corps car c'est lui qui réalise les actions que nous imaginons. J'aime considérer qu'il a sa propre volonté et que quelque part il détient toutes les solutions. C'est en travaillant en équipe avec lui que nous pourrons réaliser notre potentiel. Bien souvent nous intellectualisons les actions et interférons avec la marche naturelle de nos corps.
Ecouter les émotions
Après avoir parlé du corps, il pourrait être envisageable de penser qu'il suffit de lui donner assez de nourriture, de boisson et de sommeil pour que nous soyons toujours efficaces. Sans surprise la réponse est non !
Nous ne sommes pas des machines et avons également d'autres besoins à assouvir afin de donner le meilleur de nous-mêmes
Dans un article précédent j'ai parlé du scan corporel mais également du scan émotionnel. Des besoins doivent également être remplis afin d'être pleinement disponibles et donc tirer un maximum du moment de "l'entrainement".
Tout d'abord nous avons besoin de nous sentir rassurés et en sécurité. Une salle aménagée spécialement, des lieux de répétition régulier et familiers peuvent suffire. Ne pas connaître une pièce peut suffire à déstabiliser légèrement et à mettre nos sens en alerte là où ce n'est pas nécessaire.
Il nous faut aussi des relations sociales. En effet, nous sommes des êtres d'interaction, et même s'il arrive de ressentir le besoin de s'isoler, nous nous inspirons des autres et de leurs idées. Les échanges nous stimulent. L'amitié et les relations plus ou moins intimes nous donnent également un sentiment d'appartenance qui est rassurant. L'impression de faire partie d'un groupe et d'avoir de la valeur pour les autres membres de ce groupe.
Ensuite, nous avons également besoin de nous encourager nous-mêmes. Loin de la vanité, il faut prendre en compte la partie de nous qui a besoin de reconnaissance. Si nous ne reconnaissons pas les progrès réalisés ou les jugeons négativement, à quoi bon faire des efforts?
Une fois que tous ces besoins ont été remplis, il y a des questions qui restent : quel est le but de tout cela ? Avons-nous un objectif, une mission ? Si nous trouvons des réponses à ces questions, alors nous aurons tout gagné. En plus d'être pleinement disponibles, ce qui réduira notre temps de préparation, nous prendrons du plaisir lors des moments passés avec l'instrument et aurons une réelle motivation à nous y mettre.
Ce plaisir se transmettra au public et rendra nos interprétations vibrantes et personnelles
Respecter les signaux
Vous l'aurez compris en lisant les deux parties précédentes, nous avons un bon nombre de besoins à assouvir afin de pouvoir nous consacrer à notre instrument de manière optimale. Il est très important de reconnaitre et interpréter les différents signaux que notre corps et nos émotions nous envoient.
Il faut être à leur écoute et savoir comment y répondre. S'il est facile de sentir quand on a faim ou soif, ressentir un besoin de communiquer ou de s'auto encourager peut et doit devenir aussi naturel.
Lorsque nous étions des bébés, nous exprimions nos ressentis par des pleurs et des cris, car nous étions sensibles à tout. En grandissant nous nous sommes isolés de ces sensations. Retrouver cette proximité avec nos besoin en l'alliant avec notre capacité une fois devenus adultes d'y répondre par nous-mêmes, est le moyen de pouvoir aller plus loin sur le chemin instrumental, musical et sur le chemin de la Vie.
Pour conclure, ce n’est pas perdre du temps que d’en passer à se préparer correctement afin de tirer le meilleur des moments passés à l’instrument
Bonne pratique et n'oubliez pas de vous amuser !
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